Comment faire une
introduction de commentaire composé ? Le devoir doit pouvoir être compris sans
référence à un élément extérieur, comme on le ferait pour un article de
journal : on ne doit donc pas le commencer
par « Ce texte.. ». L’introduction « canonique », qui
satisfera les correcteurs les plus exigeants, se compose de six parties qui
sont comme autant de « zooms » successifs sur le texte : après
une phrase d’accroche (1), on évoque l’époque et le courant littéraire (2),
puis à l’intérieur de cette époque et de ce courant littéraire on présente
l’auteur, sa vie et son œuvre (3), puis à l’intérieur de l’œuvre on présente
le texte, que l’on identifie (4) ; on en dégage alors la problématique
(5) ; puis on annonce le plan du devoir (6) : 1. la « phrase d’accroche »
permet d’orienter le lecteur vers ce qui va suivre. On peut y évoquer, d’une
manière générale, la thématique du texte, ou la forme littéraire à laquelle
il appartient, ou le mouvement littéraire auquel il appartient, ou son époque,
etc. Eviter de commencer par des formules
maladroites et passe-partout comme « De tous temps les
hommes… » ou « Depuis toujours les hommes… », ou « Depuis
la nuit des temps les hommes.. » ! 2. l’époque et le courant littéraire
permettent de mieux situer le texte dans son contexte historique et d’éviter
des anachronismes. ATTENTION de ne pas plaquer
n’importe quoi sur le texte ! Un texte peut par exemple
appartenir au XIXe siècle sans être forcément romantique ! 3. dans la présentation de l’auteur il
ne faut pas forcément TOUT dire de la vie de l’auteur ! Il faut trier l’essentiel du superflu :
il faut pouvoir situer l’auteur dans son époque sans forcément connaître
exactement les dates précises de sa naissance et de sa mort. Il faut
présenter rapidement ses œuvres les plus importantes, et surtout celles qui
ont un rapport avec le texte étudié 4. identifier le texte permet alors de
repérer les présupposés, ce qu’on attend NORMALEMENT de ce genre de
texte : par exemple dans une scène d’exposition au théâtre, on va
s’attendre à ce que les personnages principaux soient présentés, ainsi que
l’intrigue. Mais justement l’auteur peut jouer sur ce que le lecteur attend
normalement et décider de le surprendre, voire de le choquer, en faisant tout
autre chose. Donc il faut réfléchir et ne pas plaquer sur un texte des remarques qui n’ont rien à
voir avec ce qu’il contient ! 5. la problématique doit repérer ce qui
est important dans le texte, la plupart du temps en examinant les rapports
entre les divers thèmes du texte : le meilleur moyen pour la dégager est
encore de se demander « Pourquoi l’auteur a-t-il écrit ce texte de cette
façon ? ». Rater sa problématique, c’est
passer à côté de ce qui est important dans le texte, et qu’on ne vous
pardonnera pas de ne pas avoir vu. 6. le plan doit aller du plus simple, du
plus évident, vers le plus compliqué, le plus subtil. L’annonce du plan doit
se faire de la manière la moins lourde possible (éviter les « dans une
première partie je dirai que… et dans une deuxième partie je dirai
que… »). Pour distinguer les trois parties, on peut utiliser
« d’abord » ou « dans un premier temps » (= première
partie), « ensuite » ou « puis » (= deuxième partie),
« enfin » (=troisième partie). _____________________________________ Exemple
d’introduction sur le texte de Bossuet, l’Oraison funèbre d’Henriette-Anne d’Angleterre : (1) Confrontés à
l’absurdité de la mort, les hommes cherchent une réponse, et à l’occasion des
funérailles l’on prononce toujours quelques mots qui servent à la fois à
louer le défunt et à consoler ses amis : c’est la fonction de l’oraison
funèbre, dont les origines remontent au moins au Ve siècle avant notre
ère avec l’oraison funèbre de Périclès qui nous est rapportée par l’historien
Thucydide. (2) Au XVIIe siècle, les funérailles
des grands personnages de la cour donnent lieu à de grandioses cérémonies, le
rituel funéraire devient presque un spectacle auquel tous accourent, autant
pour pleurer le mort que pour jouir des talents d’orateur du prêtre.(3) Parmi
les prédicateurs de cette époque, Bossuet est une sorte de star : on se
presse en foule à ses sermons, à ses panégyriques, on va à l’église comme on
irait au théâtre voir une pièce de Racine. En 1670, Bossuet est devenu un
personnage de tout premier plan : l’année précédente il a été nommé
évêque, mais surtout il a été choisi par Louis XIV en personne pour être le
précepteur du Grand Dauphin, le fils du roi. (4) Cette année-là, quand
Henriette-Anne d’Angleterre, l’épouse de Monsieur le frère du roi, décède
brusquement, c’est tout naturellement à Bossuet qu’est confiée la tâche de
prononcer son oraison funèbre devant toute la cour rassemblée autour du
cercueil de cette princesse estimée de tous. (5) L’orateur
se trouve donc confronté à la double tâche de répondre à l’émotion de son
auditoire, tout en lui expliquant que tout est bien dans la mort de Madame.
(6) Nous étudierons donc dans un premier temps en quoi la situation
d’énonciation éclaire ce texte ; puis nous verrons que dans cette
oraison Bossuet use habilement des recettes de la rhétorique classique,
d’abord pour émouvoir, et enfin pour instruire les hommes. |